Question au Collège des Bourgmestre et Echevins concernant la publication d’une brochure destinée aux enfants dans le cadre des festivités du « Bärbelendaag » par le syndicat intercommunal Pro-Sud
Madame le Bourgmestre,
Madame l’Echevine, Messieurs les Echevins,
Le syndicat intercommunal Pro-Sud vient de publier une brochure dans le cadre des festivités en relation avec la journée de la « Ste. Barbe », le 4 décembre. Cette fête est une fête populaire au Sud du pays, commémorant e.a. les sacrifices des quelques 1.400 mineurs, qui ont perdu leur vie dans les mines au Luxembourg. La publication de Pro-Sud comprend 32 pages, destinées aux enfants des cycles 3 et 4 de l’enseignement fondamental. Sur 24 des 32 pages, la légende de Barbe est retracée sous forme d’une bande dessinée, 4 pages expliquent la relation avec le monde des mineurs et deux pages introductives sont rédigées par la présidente de Pro-Sud, Madame Lydia Mutsch. Les 24 pages sur Barbe parlent d’un homme (turc et païen) qui enferme sa fille, Barbe, dans une tour, dans laquelle un pigeon lui apporte la croyance chrétienne, que le père refuse. La fille devenue croyante est menacée par son père, s’enfuit, le père la retrouve, l’incarcère, la laisse torturer et finit par lui abattre la tête…
Ces 24 pages se contentent à raconter en images tendancieuses un mythe catholique – que même des théologiques ne reconnaissent pas comme fait historique ! – sans la moindre indication qu’il s’agit d’une pure fiction religieuse, n’ayant aucun rapport avec une réalité historique. L’introduction de la brochure commence avec la phrase : « Ce livre raconte l’histoire d’une jeune femme du 3e siècle qui est morte en tant que martyre »
Les images de la brochure sont à moitié colorées et à moitié en noir et blanc. L’introduction invite les enfants à colorer les images en noir et blanc. Sur ces images à colorer par des enfants de 8 à 12 ans sont e.a. représentées : la fille enfermée, le père (païen) menaçant avec un sabre sa fille (croyante), Barbe (croyante) torturée par les soldats de son père (païen), le père (toujours païen) abattant la tête de sa fille (toujours croyante) et… : DIEU lui-même (à deux reprises).
L’introduction conclut avec une invitation aux enfants de « faire un dessin de la journée de la Sainte-Barbe telle que tu souhaites la vivre dans ta commune. Envoie-nous ton dessin et tu te verras récompensé d’un joli cadeau. »
En résumé, cette publication dédie ¾ de son contenu à une fable religieuse sanglante – sans la présenter comme telle ! -, n’ayant point de rapport avec la tradition des festivités de la Ste. Barbe célébrée au Luxembourg. La vie et les conditions des mineurs étant tout à fait périphériques, aucune instruction quant à l’histoire du sud du pays et des hommes et des femmes l’ayant développé ne s’y retrouve. Cette brochure rappelle plutôt un ancien manuel de doctrine chrétienne traitant un sujet délicat (la liberté de confession) d’une façon qui laisse la porte grande ouverte aux interprétations de la sphère fantasmagorique dangereuse d’un Samuel Huntington.
Selon mes informations, cette publication fût envoyée à tous les entités scolaires eschoises afin de la distribuer aux enfants, avec la mention que la décision de la distribuer et de la traiter en classe appartiendrait à chaque enseignant.
Mesdames, Messieurs,
Les faits évoqués ci-dessus nécessitent des explications que je vous demande de me fournir en me référant à l’article 4 de notre règlement d’ordre intérieur et dont les réponses et la communication des réponses devraient se faire selon les modalités prescrites par le même article :
1. Tout en prenant note des phrases introductives rédigées de Madame le Bourgmestre en sa fonction de présidente de Pro-Sud, quelle est la position commune du Collège échevinal de la Ville d’Esch-sur-Alzette quant au contenu de cette publication ?
2. Selon mes informations, le Collège échevinal vient d’arrêter la distribution de la brochure. Combien d’élèves eschois ont néanmoins reçu cette publication, en l’occurrence, combien d’enseignants l’ont distribué avant l’ordonnance de l’arrêter? Y a-t-il des classes qui ont traité la publication ?
3. La publication parle dans sa majeure partie d’une fable chrétienne. Y-a-t-il eu une concertation avec l’archevêché ? Dans l’affirmative ou la négative, pourquoi ?
4. La distribution aux élèves en classe, fût-t-elle été conçue d’office de manière à ce que les élèves inscrits en instruction morale en fussent épargnés ?
5. Dans la négative, n’êtes-vous pas d’avis que l’invitation à colorer des images de Dieu va à l’encontre d’autres religions (qui refusent la représentation de Dieu) ou d’autres conceptions laïques (qui remettent en question cette conception de Dieu)?
6. Quelle a été l’intention pédagogique de cette brochure ? Qui a développé sa conception ?
7. Quel est le tirage de la publication ?
8. Quel est le coût global de la publication (graphiste, texte, impression, etc.) ?
9. Quel est la récompense, le « joli cadeau », prévue pour les enfants ayant envoyé leurs dessins à Pro-Sud après avoir lu la brochure et coloré les images ?
En attendant votre réponse précise aux différents points énumérés ci-dessus, je vous prie, Mesdames, Messieurs, de bien vouloir agréer l´expression de ma parfaite considération.
Marc Baum
Conseiller communal