Madame le Bourgmestre prétend qu’un tiers des constructions à Luxembourg-Ville seraient protégés.
Or la réalité est tout autre: ce n’est que dans la Vieille Ville, le secteur protégé du Parc, l’avenue de la Liberté avec les rues adjacentes et les faubourgs que les démolitions sont interdites. Par contre, si une construction est classée avec d’autres dans un “ensemble sensible”, la démolition reste possible, à condition que la taille des parcelles existantes soit respectée et que le nouveau bâtiment s’insère de manière harmonieuse et cohérente dans l’ensemble restant. Or, ce sont là des critères très subjectifs, qui ont peu de chances de résister au plaidoyer d’un avocat habile.
Au fil des ans, de nombreuses constructions dignes d’être préservées ont été victimes de promoteurs sans scrupules, et le parti de Madame Polfer – qui à l’exception des années 1964 à 1969 a toujours fourni le bourgmestre de la ville depuis 1945 – a laissé faire. Le boulevard Royal, située tout près du secteur protégé, est l’exemple type d’une rue prestigieuse qui a totalement été détruite.
déi Lénk saluent évidemment tout ce qui va en direction de la protection du patrimoine architectural et ils ont donc voté pour l’extension des “ensembles sensibles”. Mais ils considèrent ce concept comme un pis-aller , et cela pour trois raisons principales:
- il se base sur des critères flous et subjectifs, qui ne permettent pas de décider de manière conséquente et qui ne tiendront pas le coup face à une argumentation judiciaire;
- il ne se prête pas à des situations où suite au laxisme lors des décennies précédentes, des pans entiers d’un prétendu “ensemble harmonieux” ont déja disparu;
- il ne permet de protéger ni les façades, ni l’intérieur de bâtiments dignes d’être préservés pour les générations futures.
déi Lénk plaident pour une discussion sérieuse au Conseil communal sur la protection du patrimoine dans notre ville. La convention de Grenade pour la sauvegarde du patrimoine architectural de l’Europe, que le Luxembourg s’apprête enfin à signer au bout de 30 ans, contient l’engagement d’établir un inventaire du patrimoine architectural sur la base de critères précis et multiples et d’empêcher la défiguration, la détérioration et la destruction des bâtiments qui y figurent. Un tel inventaire s’impose certainement pour la Ville de Luxembourg.
Encadré “Ensemble sensible” : un concept malléable à souhait – preuve à l’appui
Dans la partie inférieure de l’avenue de la Gare, la destruction de la substance ancienne a pris de telles proportions que seulement quelques maisons du début du 20e sciècle restent encore debout. Dès lors, on ne peut plus parler d’”ensemble harmonieux et cohérent” et les vieilles maisons qui ont survécu font plutôt figure de corps étranger au milieu des horreurs architecturales qui les entourent.
Dans une telle situation, le classement comme monument national reste le seul moyen de protection de la substance historique.
Mais le collège échevinal s’y refuse et sort son argumentaire bien rodé que grâce à un classement en “ensemble sensible”, on pourrait trouver une solution valable avec le propriétaire de ces maisons, en lui accordant un rehaussement de la façade et en lui offrant même un dépassement des parcelles existantes. Voilà que le sacro-saint droit de propriété est préservé – aux dépens bien entendu de la protection de la substance historique pour les générations futures. Mais il faut faire des choix dans la vie ! En procédant ainsi, le collège échevinal a lui-même fourni la preuve que le concept “ensemble sensible” est malléable à souhait et que sa valeur protectrice tend vers zéro.

