Voici venu le temps de la chasse aux mendiants

Communiqué de presse

Luxembourg, le 17 mars 2023

Voici venu le temps de la chasse aux mendiants

déi lénk Stad s’indigne contre la volonté de la majorité DP-CSV d’interdire la mendicité dans le cadre d’un nouveau règlement de police. Les élus DP et CSV veulent combattre les pauvres au lieu de combattre la pauvreté. La majorité montre son vrai visage, celui du mépris social.

Si cette attitude n’est assurément ni chrétienne ni sociale, elle exprime en revanche parfaitement l’état d’esprit de l’élite libérale qui gouverne notre ville depuis 54 ans. Elle exprime non seulement le mépris des riches envers les pauvres, mais aussi l’arrogance de la part de ceux qui, possédant le pouvoir de décision politique et la parole officielle depuis des décennies, en concluent que cette ville leur appartient.

En cette période électorale, l’interdiction de la mendicité fait figure de message populiste en direction des électeurs et électrices qui se sentent importunés et insécurisés par la pauvreté apparente. La similitude avec les mesures illégales et inefficaces de surveillance de la voie publique par des agents de sécurité privés est frappante.

Sans vouloir nier qu’il existe certains réseaux qui exploitent des personnes, la mendicité va au-delà de ce phénomène. La mendicité est un phénomène pluriel. Il y a ceux qui font partie d’un réseau et ceux et celles qui ne le font pas. Avec sa décision, la majorité met tout le monde dans le même bain.

La décision de la majorité ne méprise non seulement les pauvres, mais aussi l’État de droit, marquant une étape supplémentaire dans la « trumpisation » de l’équipe DP-CSV. En effet, la mesure projetée est très probablement contraire à la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) et à la Constitution. Dans un arrêt du 19 janvier 2021, la Cour européenne des droits de l’homme a en effet jugé que la mendicité n’est autre chose que « le fait de s’adresser à autrui pour obtenir de l’aide » et, de ce fait, relève du droit à la vie privée protégé par l’art. 8 de la CEDH. Citant de nombreux rapports d’experts internationaux, la Cour a exprimé ses doutes quant à la capacité de mesures interdisant la mendicité de contribuer à la lutte contre la traite des êtres humains. Elle a surtout jugé que des mesures d’interdiction générales étaient toujours contraires à l’art. 8 de la CEDH, car non proportionnées au but poursuivi. En couvrant l’intégralité de la Ville Haute (y compris ses parcs) et la quasi-intégralité du quartier de la Gare, la mesure projetée s’apparente à une telle interdiction générale. Totalement disproportionnée, nullement nécessaire dans une société démocratique, ne poursuivant aucun intérêt général légitime, elle viole également l’art. 37 de la nouvelle Constitution qui entrera en vigueur le 1er juillet 2023.

La mendicité est le fruit d’inégalités sociales. L’inégalité est un problème sociétal, auquel il faut des solutions sociétales. Les solutions répressives n’y apporteront aucune solution. Elles risquent seulement de déplacer la mendicité vers d’autres quartiers, notamment Bonnevoie et Hollerich.

Plus fondamentalement, la question est de savoir quelle ville nous voulons. Les élus DP et CSV veulent un centre-ville débarrassé de tout signe de misère, réservé aux gens qui affichent ouvertement leur richesse. Or nous pensons qu’il n’y a aucune dignité à vouloir exclure davantage les pauvres. Pour la très grande majorité d’entre eux, mendier n’est pas un choix de vie, mais le produit d’un engrenage néfaste, qui se termine mal très souvent. Alors que personne n’est définitivement à l’abri d’un accident de vie,  rester disponible face à la misère apparente est à la fois un devoir d’humilité et d’humanisme. Pratiquer la ségrégation des mendiants dans notre ville s’y oppose totalement.

déi Lénk Stad demande à la coalition DP-CSV de retirer les mesures anti-pauvres du nouveau règlement de police, qui sera probablement mis au vote lors du conseil communal du 27 mars prochain.

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